• Les 10 stratégies utilisées par l’Etat, les Gouvernements locaux, les Universitaires larbins et les Entreprises en ce qui concerne Minamata et Fukushima

    Dénoncer toujours et encore avec détermination les agissements ignobles des états.

    Gaulois. 

    Aileen Mioko Smith est une activiste anti-nucléaire. Directrice de l’ONG Green Action, elle est très impliquée dans la défense des victimes de la catastrophe de Fukushima. Dans le même esprit qu’un Noam Chomsky, elle a dévoilé les 10 stratégies de manipulation du lobby nucléaire japonais contre les victimes de la catastrophe de Fukushima. L’article ci-dessous est paru le 4 mars 2012 dans le quotidien japonais "The Mainichi Daily News".

    Les activistes anti-nucléaires voient des similitudes entre Minamata et Fukushima

    Selon Aileen Mioko Smith - qui avec son défunt mari, le photographe Eugène Smith, avait attiré l’attention du monde entier sur l’une des maladies causées au Japon par une pollution extrême - "la crise nucléaire en cours à Fukushima et la maladie de Minamata ont de nombreux traits en commun". Et quand on lui a demandé ce que les deux catastrophes avaient en commun, elle a répondu : "L’inégalité". Ce n’est pas l’inaction du gouvernement qu’elle a mis en avant en premier, mais plutôt toute cette injustice.

    "La maladie de Minamata est apparue lorsque la principale entreprise de produits chimiques Chisso Corp - s’étant trouvée distancée par ses concurrents dans la transition industrielle vers la pétrochimie - a décidé de sacrifier Minamata (Préfecture de Kumamoto), et en a tiré profit. Tandis que la contamination environnementale se propageait à Minamata, le siège de Chisso Corp’s prospérait. On peut dire la même chose pour Fukushima. Si les centrales nucléaires avaient été construites à Tokyo,  on ne se serait exposé à aucune perte d’énergie à travers le réseau électrique. Mais les centrales avaient été construites à Fukushima, Et Tokyo jouissait de l’énergie électrique. La structure de l’inégalité - dans laquelle quelqu’un gagne et quelqu’un perd - est la même."

    En d’autres termes, les zones régionales du Japon sont sacrifiés au profit des grandes villes.

    "Si l’on y pense en termes de quantité de dommages subis par rapport au nombre d’habitants, on peut dire que, dans cette campagne à population clairsemée,  il y a moins de dommages qu’il y en aurait eu dans une grande ville. Mais un tel mode de pensée n’ignore t-il pas la valeur de la vie de tout un chacun ? Pour tout individu, admettre le moindre dommage est déjà un échec à 100%."

    Les expériences personnelles de Smith avaient commencé en regardant le monde depuis l’intérieur d’automobiles d’origine étrangère. Née d’un père américain - qui était dans le commerce international - et d’une mère japonaise, c’est au travers des fenêtres des voitures de son père que Smith avait vu les manifestations contre l’accord de sécurité Etats-Unis/Japon de 1960, et les enfants pauvres de Hong-Kong et du Vietnam se précipiter vers ces automobiles-mêmes où elle était assise. Elle avait senti que la culpabilité grandissait en elle, et qu’il lui tardait de l’exprimer.

    Après le divorce de ses parents, Smith, âgée de 11 ans, alla vivre avec ses grands-parents aux Etats-Unis. Elle avait été victime de discriminations quand elle était au Japon, parce qu’elle était de sang mêlé, mais une fois arrivée à Saint Louis,  elle avait été dévisagée de haut en bas en tant que Japonaise. Sa nostalgie du Japon s’accroissant, Smith se jura de ne jamais tolérer ceux qui regardent avec condescendance le Japon et le reste de l’Asie.

    A la racine du mépris de Smith pour l’inégalité, il y avait donc son oscillation enfantine entre le statut de bourreau et celui de victime, entre l’oppresseur et l’opprimé.

    A l’âge de 20 ans, Smith rencontra le photographe mondialement connu Eugène Smith, qui avait 52 ans à l’époque. Ils se marièrent et déménagèrent pour Minamata, où ils prirent des photos. Smith servit aussi d’interprète à son mari, qui ne parlait pas le Japonais. Ils accompagnèrent les victimes du syndrome de Minimata à leurs procès, et passèrent des journées et des nuits entières avec eux. Depuis son reportage sur l’accident de Three Miles Island en 1979 - l’année suivant le décès de son mari - Smith est devenue une fervente avocate anti-nucléaire installée à Kyoto. 

    Après le grand tremblement de terre de l’est du Japon et le tsunami du 11 Mars, l’année 2011 a vu naître un désastre nucléaire, Smith s’est rendue à maintes reprises à Fukushima, en tant que leader d’une organisation environnementale municipale. Elle a aussi organisé des sit-in avec tentes devant le Ministère de l’Economie, du Commerce et de l’Industrie (METI).

    "J’ai établi ce que la maladie de Minamata et la crise nucléaire de Fukushima ont en commun" déclara Smith, en mettant deux feuilles de papier devant-elle. La liste s’intitulait "Les 10 stratégies utilisées par l’Etat, les Gouvernements locaux, les Universitaires larbins et les Entreprises, en ce qui concerne Minamata et Fukushima."

    Smith m’expliqua : "Personne n’a été capable d’établir clairement qui était responsable du désastre nucléaire. On ne sait même pas qui a fixé les standards d’évacuation à 20 millisieverts de radiations par an. Les instances gouvernementales utilisent leur propre esprit de chapelle pour se rejeter cette responsabilité les unes sur les autres, en disant : 'C’est de la responsabilité du Ministère de l’Education, de la Culture, des Sports, de la Science et de la Technologie' ou 'Non, cela relève de la juridiction de la Commission de Sûreté Nucléaire (NSC).'

    "Bien qu’il ait été dit qu’il n’existe pas de degré 'sûr' d’exposition aux radiations, les autorités ont intentionnellement divulgué la vague suggestion selon laquelle 'être exposé à 100 milli sieverts de radiations par an ne posait pas de problèmes', augmentant ainsi la confusion parmi les victimes. Ce sont là des tactiques que nous voyons  être beaucoup trop utilisées par le gouvernement et les Universitaires dans le cas de la maladie de Minamata."

    Smith est tout aussi critique à l’égard de l’enquête préfectorale sur la gestion de la santé des habitants, conduite par le gouvernement local, à propos de laquelle elle écrit que : "son point de départ est la conclusion selon laquelle les niveaux d’exposition aux radiations ne sont pas trop mauvais, ce qui n’est qu’une stratégie destinée à réduire le seuil d’ éligibilité à indemnisation."

    Ce qui peine le plus Smith, se sont les divisions qui se font jour entre les victimes de la catastrophe. "Un professeur de la circonscription de Fukushima - qui avait temporairement quitté son travail, juste après la catastrophe nucléaire, afin d’aider à évacuer des membres de sa famille, fut considéré comme un 'lâche' et un 'traître' par des collègues... Tout le monde a peur. Et c’est justement parce qu’ils veulent surmonter cela ensemble, que les gens ne sont pas capables de pardonner ceux qui quittent Fukushima."

    Les gens que Smith voit à Fukushima se comportent à ses yeux de façon très semblable à ce qu’elle a vu à Minamata. Dans les deux cas, les choses aboutissent soit à une réconciliation soit débouchent sur un procès.

    "Les victimes de Minamata se sont aussi scindées en plusieurs factions, et se sont vues repoussées dans des positions où elles ne pouvaient s’empêcher de se heurter les unes aux autres. Les cicatrices perdurent même aujourd’hui, quelque 50 ans après", dit Smith. Et voilà entre toutes, la raison principale qui la pousse à offrir cela aux victimes de Fukushima : «fuir ou ne pas fuir». Que l’on soit capable de fuir ou pas. Les clashs se produisent dans les villes, sur les lieux de travail et même au sein des familles. Mais arrêtons-nous pour penser. C’était l’Etat et Tokyo Electric Power Co.(l’opérateur de la centrale électrique) qui nous avait divisés. Qui va tirer profit des conflits entre victimes ?"

    Le 11 Mars 2011, Smith était aux Etats-Unis avec sa fille, profitant d’un peu de loisir pour la première fois depuis longtemps. Ce qui lui est venu en premier à l’esprit, quand elle a vu le reportage à la télévision sur la situation de crise à la centrale nucléaire de Fukushima, c’est que  «plusieurs décennies de souffrances allaient commencer» Semblables aux années de souffrance engendrées par la maladie de Minamata.

    La maladie de Minamata - un syndrome neurologique causé par le mercure qui avait été jeté dans la baie de Minamata par Chisso Corp. - a été officiellement reconnue par le Gouvernement en 1956. En 2004, la Cour Suprême a pratiquement écarté les normes de certification de Minamata - établies en 1977 - en arguant qu’elles étaient «trop étroites». En 2009, le Gouvernement a fait adopter une loi sur les mesures spéciales pour l’indemnisation des patients atteints de la maladie de Minamata, pour finalement décider, fin juillet 2012, de clore l’enregistrement des requêtes en indemnisation.  Et ce, alors même que des groupes de défenseurs des malades - dont le combat se poursuivait depuis un demi-siècle - étaient partis en guerre contre le fait que le gouvernement continuait à tirer un trait sur les victimes de Minamata.

    Les leaders des groupes de défenseurs de Minamata ont maintenant la cinquantaine. Ce sont des personnes qui, jeunes enfants, ont mangé du poisson qui était infesté de mercure. Cela m’interpelle chaque fois que je vais à Fukushima. Je ne veux pas créer une réalité telle que, lorsque les jeunes enfants d’aujourd’hui nous demanderont un jour : "Mais vous, qui étiez adultes, qu’avez-vous fait alors ?",  notre unique option soit de demander pardon.

    Alors que j’allais me lever après avoir parlé avec Smith pendant trois heures, elle m’arrêta et dit : "Je veux que vous compreniez bien ceci."

    "Ayant été impliquée aussi bien à Minamata qu’à Fukushima, il y a des moments où je sombre dans l’illusion que je vis dans le même monde que les victimes, mais cela n’est pas vrai. On ne peut pas comprendre la souffrance des victimes sauf si on se trouve dans la même situation. Pour moi, avoir conscience du fait que je ne peux pas comprendre ce que ressentent les victimes, et malgré cela parler en leur nom, et juste après leur faire face, c’est effrayant".

    "Mais, je persiste à penser que je vais continuer à faire entendre ma voix. Je veux que les gens qui vivent à Fukushima et ceux qui ont fui Fukushima, réalisent que - comme pour les victimes de Minamata - ils ont, eux aussi, été poussés à s’opposer les uns aux autres. En réexaminant ce fait, ils trouveront peut-être des moyens de réconfort ou de rédemption".

    Les 10 stratégies utilisées par l’Etat, les Gouvernements locaux, les Universitaires larbins et les Entreprises en se qui concerne Minamata et Fukushima

    1. N'assumer aucune responsabilité. Utiliser la compartimentation pour rejeter la responsabilité des problèmes sur les autres.

    2. Dérouter les victimes et l’opinion publique, en créant l’impression qu’il y a des pour et des contre de chaque côté.

    3. Opposer les victimes les unes aux autres.

    4. Ne pas enregistrer de données ou laisser de preuves.

    5. Gagner du temps.

    6. Organiser des tests ou mener des enquêtes qui vont sous-estimer les dommages.

    7. Saper le moral des victimes jusqu’à ce qu’elles abandonnent.

    8. Créer un système de certification officielle qui fait chuter le nombre de victimes.

    9. Ne pas divulguer d’informations à l’étranger.

    10. Faire appel aux Universitaires larbins pour organiser des conférences internationales.
     
    Source : http://mdn.mainichi.jp/mdnnews/national/news/20120304p2a00m0na005000c.html

     


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