• Fuite de gaz rares de l’EPR chinois


      Jusque là tout va bien ! Jusque là, tout va bien ! Jusque là, tout va bien ... 

    Le nucléaire une valeur sûr ! Enfin c'est ce que la filière EDF et compagnie veut bien nous faire croire ! Au fait, la prochaine catastrophe, c'est pour quand ? ? ?

    Gaulois. 

    Fuite de gaz rares de l’EPR chinois, défaut lourd de conséquences pour EDF.
    Pierre Peguin août 2021

    La fuite de gaz rares de l’EPR chinois met au jour un défaut générique des gaines des barres de combustibles dont la gravité est sous estimée.
    La stratégie d’EDF paraît contestable face à un problème technologique irrésolu qui touche les réacteurs les plus puissants et en particulier la filière EPR.

    Depuis la révélation par la chaîne américaine CNN de la fuite de gaz rares du réacteur EPR N°1 de Taïshan , EDF dans un communiqué du 22 juillet, a reconnu que cela vient des gaines des combustibles, ceux-ci provenant de l’usine de Romans sur Isère.
    Sous la pression de la médiatisation du sujet, on apprend que la Chine vient d’arrêter le réacteur et qu’EDF qui restait jusque là discret sur la fragilité des nouvelles gaines reconnaît avoir déjà rencontré ce problème dans certains réacteurs du parc!….

    La Chine et la France espèrent que les choses en restent là, en minimisant l’événement jusqu’à extinction de l‘intérêt des médias.

    En quoi ce problème est-il important ?

    Dans les réacteurs nucléaires trois barrières de confinement doivent empêcher que les radioéléments ne se dispersent dans l’environnement : Les gaines de combustibles, le circuit d’eau primaire de refroidissement du cœur et enfin l’enceinte de béton qui entoure le cœur du réacteur(1). La dégradation par corrosion des gaines sous l’effet du rayonnement neutronique intense est responsable de fuites de « gaz rares » vers le circuit primaire auxquels ils échappent car difficiles à piéger, contaminant l’enceinte puis l’environnement ayant ainsi franchi les barrières de confinement.

    Plus grave il vient d’être constaté à Chooz que la corrosion de gaines les rendent fragiles, leur rupture pouvant avoir de très graves conséquences (2).

    Ce n’est donc pas une question anodine, qu’EDF cherchait jusque là à contourner et à camoufler, jouant une fois de plus discrètement avec la santé des travailleurs, voire des populations environnantes.

    Tout d’abord qu’appelle-t-on « gaz rares », ce sont des gaz inertes qui n’interagissent avec rien, donc très difficiles à piéger. Ils existent à très faible proportion dans l’air. Mais ceux issus des réactions de fission nucléaire sont radioactifs et donc irradient. Il s’agit du Xénon 133, et du krypton 85.

    EDF prétend que puisque les gaz rares ne sont pas métabolisés par les organismes vivants, ils n’interfèrent pas avec les tissus vivants. C’est évidemment faux puisqu’ils sont radioactifs. Ils peuvent provoquer des irradiations externes et aussi internes s’ils sont inhalés. C’est d’abord le personnel qui risque d’être touché par l’air contaminé du bâtiment réacteur, mais cela arrange le lobby de minorer la question sous prétexte que les gaz se diluent dans l’air.

    Passé sous silence le problème n’est pas nouveau,

    Mais on apprend que cette corrosion est apparue récemment dans un des deux réacteurs de la centrale de Chooz. Dans une discrète note d’information publiée le 13 juillet dernier, EDF annonce que des phénomènes de "corrosion atypique" (3) ont été observés sur le combustible de certains réacteurs du parc parmi les plus puissants, à Chooz, Civaux et à Cattenom.

    Dans tous les cas il s’agit de combustibles dont les gaines sont en alliage dit « M5 ». Il s’agit comme ses prédécesseurs d’un alliage à base de zirconium dont la composition est modifiée dans le but d’accroître sa capacité à résister aux conditions extrêmes de fonctionnement des réacteurs les plus puissants (4).

    L’enjeu pour EDF est essentiel. Ces combustibles aux gaines en M5 équipent les EPR de Chine, et celui de Finlande qui ne fonctionne pas encore. Ils sont en cours de livraison à l’EPR de Flamanville, fameux réacteur EPR déjà construits laborieusement avec cuve et éléments non conformes et le voila alimenté en combustibles inadaptés ! S’il fonctionne un jour, ce qui n’est pas gagné, ce sera en sous fonctionnement déjà rendu nécessaire par la cuve fragilisée par la composition irrégulière de l’acier.

    Que sait-on du problème rencontré ? (5)

    Il s’agit de phénomènes de corrosion favorisés par les conditions extrêmes de radioactivité, de température et de déformations dans les réacteurs de 1400 MWe et l’EPR chinois de 1750 MWe. Le groupe chinois CGN, principal actionnaire de celui-ci a annoncé le 30 juillet sa mise à l’arrêt, décision qui suit de près l’annonce par EDF le 22 juillet que les fuites conduiraient à l’arrêt du réacteur s’il était en France.

    Une fois amorcée, la corrosion ne peut qu’empirer (« inétanchéité évolutive des crayons ») et le réacteur doit être arrêté pour vérifier les combustibles touchés.

    A ce jour, du combustible à gainage en alliage M5 est présent dans 17 réacteurs de 900 MWe, trois de 1300 MWe et les quatre de 1450 Mwe. Il équipe aussi des réacteurs à l’étranger.

    Plus grave : Risques de rupture

    EDF prétend que la corrosion accélérée des gaines de combustible M5 n’entraîne pas de risque de rupture des crayons et ne présente pas d’enjeu de sûreté. Or quand EDF a voulu examiner les crayons corrodés du réacteur n°2 de Chooz, deux se sont cassés. Un événement exceptionnel et inquiétant qui montre la fragilisation des éléments de combustibles touchés par ce phénomène.

    On peut alors se demander si le risque de rupture de l’un des milliers de crayons de combustible, en cours de fonctionnement du réacteur, ne serait pas possible avec de très graves conséquences difficiles à imaginer. Cela peut-il être vraiment à exclure ?

    Cela n’empêche pas EDF d’annoncer son intention de recharger les deux réacteurs de la centrale de Chooz avec « certains assemblages présentant de faibles épaisseurs de corrosion » quitte à en en limiter la puissance de fonctionnement à 92 % de leur capacité. Il en sera de même pour ceux de Civaux et de Cattenom !

    Quelles leçons tirer de ces évènements ?

    - Remarquons que cette question était déjà connue avant qu’elle soit (aimablement) médiatisée par les US, que la priorité d’EDF était de la camoufler autant que possible.

    - Il s’agit pour EDF de disposer de gaines de combustibles résistant aux conditions de fonctionnement de réacteurs les plus puissants, ceux du parc de 1400MWe, et ceux à venir, les EPR de 1750MWe. Et il apparaît que l’alliage M5 est inadapté, qu’il ne peut garantir l’étanchéité des gaines et de jouer son rôle de barrière de confinement. La rupture catastrophique d’éléments de combustibles corrodés n’est pas à exclure.

    - EDF prend le risque de continuer à alimenter des réacteurs avec ce combustible gainé en M5, contraint d’adapter leur fonctionnement aux gaines défectueuses en réduisant leur puissance. .

    - Enfin notons que l’expérience du fiasco de Superphénix et de celui à venir d’Iter, n’a pas servi de leçon, EDF est à nouveau victime du gigantisme promu par l’élite des nucléocrates qui s’enferrent dans des problèmes technologiques difficiles à résoudre.

    Ainsi la fuite de gaz rares de l’EPR chinois révèle la faiblesse technologique de la 1ere barrière de confinement, celle des gaines de combustibles dégradées par la corrosion des réacteurs de très grande puissance et en particulier des EPR.
    Il s’agit là d’un grave défaut générique pour lequel la seule solution actuelle est le fonctionnement à puissance réduite.

    La stratégie contestable d’EDF se prolonge par l’intention de charger les EPR avec ce type de combustibles, et même de recharger des éléments déjà corrodés dans certains réacteurs avec les risques que cela comporte. L’électricien ne dispose peut-être pas de solutions de rechange….

    Se confirme ainsi l’échec des projets surdimensionnés impliquant d’atteindre les limites technologiques disponibles économiquement.

    (1) Les assemblages de combustible nucléaires, Le cœur d’un réacteur nucléaire est composé d’assemblages de combustible (205 pour un réacteur de 1450 MW). Chaque assemblage contient 264 crayons, tubes d’alliage de zirconium (1ere barrière de confinement), de longueur de quatre mètres et de diamètre d'un centimètre, dans lesquels sont empilées les pastilles d’uranium (et de plutonium éventuellement).

    En fonctionnement, ces assemblages sont traversés de bas en haut par l’eau du circuit primaire chargée d’évacuer la chaleur vers le circuit d’eau secondaire alimentant les générateurs de vapeur.
    Les assemblages et les crayons de combustible sont fabriqués en France par Framatome, filiale d’EDF,
    à Roman/Isère. Les pastilles de combustible sont préparées au Tricastin et à Marcoule.

    (2) De graves dégâts possibles. À Chooz, lorsque des crayons de combustible oxydés ont été retirés des assemblages pour les analyser, ils se sont brisés. La première barrière de confinement peut donc être tellement altérée par l’oxydation qu’elle ne résiste plus aux manipulations. Le risque est donc une contamination de l’eau du circuit primaire par du combustible radioactif et des produits de fission !
    Rappelons que le circuit primaire est non seulement chargé d’évacuer la chaleur du coeur, mais joue aussi le rôle de deuxième barrière de confinement. Si son étanchéité n’est pas parfaite (et c’est le plus souvent le cas compte tenu des milliers de soudure), il ne reste plus que l’enceinte en béton pour confiner la radioactivité (mur traversé par de multiples tuyaux, des canalisations et de nombreuses ouvertures…).

    (3) Observations de la corrosion : La fiabilité des crayons à gainage en alliage M5 avait déja été mise en doute dès 2001 du fait de l’apparition de fuites au niveau des soudures entre les tubes et les bouchons. Plus récemment des traces blanchâtres localisées sont constatées sur des assemblages et des particules de couleur blanche de quelques millimètres sont recueillies dans les dispositifs anti-débris. il apparaît que les particules observées sont la conséquence d’une oxydation, plus importante qu’attendue, des gaines des crayons de combustible.

    (4) Constitution des gaines
    https://www.irsn.fr/FR/Actualites_presse/Actualites/Documents/irsn_surete-parc-2008_gainage-combustible-M5.pdf

    Les gaines sont en alliage de zirconium, métal utilisé notamment parce qu’il absorbe peu les neutrons, enrichi de différents éléments tels que chrome, fer, nickel, niobium étain, etc. L’alliage utilisé précédemment s’appelait Zircaloy4. Mais EDF met en œuvre depuis plusieurs années sur son parc de réacteurs l’alliage dit Massif 5 (M5) de composition un peu différente. Cet alliage a été développé en vue d’améliorer la résistance à la corrosion, à la déformation et à l’hydruration (ou absorption d’hydrogène) du gainage sous l’effet de l’irradiation neutronique.

    C’est dès 1988 que des essais ont commencé par le chargement de quelques crayons de combustible ainsi gainé, jusqu’à l’introduction en1999 d’une première recharge complète dans le réacteur de Nogent 2. Les gaines des crayons étaient alors en alliage M5 mais la structure des assemblages (grilles de maintien...) était toujours en zircaloy 4. Mais dès 2001 des fuites de gaines d’assemblages de combustible équipés de crayons en alliage M5 ont été observées. Ce n’est qu’en 2004 que le premier chargement d’assemblages « tout M5 » est intervenu dans la tranche 2 de la centrale de Nogent.

    (5) « Corrosion atypique des gaines de quelques crayons de certains assemblages » avait annoncé l’industriel le 13 juillet 2021. Des "traces blanchâtres" et des "particules de couleur blanche" ayant été observées sur des assemblages de combustible d’abord à Chooz, puis à Civaux et enfin à Cattenom.

    EDF avait déclaré le 7 juillet , auprès de l’Autorité de sûreté nucléaire, un événement significatif de sûreté générique de niveau 0 sur l’échelle INES qui en compte 7, pour les réacteurs suivants : Chooz 2, Civaux 2, Cattenom 3. https://www.edf.fr/sites/default/files/ess_gen_niv0_k_juillet2021_0.pdf

    Pour EDF la faible teneur en fer de l’alliage des gaines serait en partie responsable de leur dégradation, mais aussi la température particulièrement élevée en haut du cœur, zone des gaines se sont détériorées dans deux réacteurs de 1450 MWe en France. Par ailleurs les opérations d’insertion des crayons dans les grilles de maintien de ces crayons peuvent créer des copeaux à l’origine de pertes d’étanchéité.

    Toujours est-il que le problème n’est pas résolu !


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